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300 dpi av. J.-C.

Yoan Beliard

 

Exposition du 6 mai au 12 juin 2021

 

Yoan Beliard est un artiste plasticien qui réfléchit et travaille la forme et la fonction des objets qu’il invente. Diplômé de l’école Boulle, il structure et agence de manière subtile des objets indéfinis, contenants et réceptacles d’informations de natures différentes.

Le travail de l’artiste consiste en une accumulation et une association, d’éléments jouant les uns avec les autres dans un dialogue ininterrompu, qui conduisent à des questionnements et ouvrent à des narrations. Il les architecture et les transforme, créant ainsi une sédimentation qui rend perceptible l’expérimentation qui s’y joue.

« Périodiquement nous rouvrons les yeux : tout est changé. Non détruit. Arrangé autrement. Et chaque fois nous nous lançons dans ce monde tout neuf avec une ardeur nouvelle » ces mots écrits par Francis Ponge semblent parler du travail de Yoan Beliard tant ils sont en accord avec ce que nous voyons dans les pièces de l’artiste.

Par la création d’objets hybrides, le plasticien produit des télescopages de temporalités, de civilisations et de cultures qui évoquent tout à la fois l’archéologie, la mémoire qu’il met en tension et contradiction avec des objets usuels de notre quotidien.

Par son anachronisme, l’exposition au titre mystérieux de 300 dpi av JC relève de cette collision temporelle. Les DPI indiquent dans notre langage informatique contemporain le nombre de points (ou de pixels) où l’image reproduite nous semble nette. Aussi, Yoan Beliard nous invite à modifier notre logiciel, ce qui est le propre de l’artiste, à mon sens. Il bouscule notre façon de voir, de regarder et de penser. Il nous incite à une résolution et une conversion. Nous sommes amenés é ajuster notre perception en déplaçant le curseur des datations du passage du temps et de ses strates, en modifiant notre focale et profondeur de champ.

Techniquement Yoan Beliard part de documents variés, parutions, livres témoignant de réalisations architecturales, d'artefacts de civilisations anciennes. Il en extrait des images qu’il retravaille, les prélève par le plâtre, afin d’obtenir des fragments « fossilisés » comme pétrifiés par le temps. Ces moulages d’objets, éléments ayant vécus et marqués par leur utilisation, perdent leur usage puisque l’artiste gomme leur existence antérieure pour révéler leur pure forme et les empiler en compositions qu’il nomme bas-reliefs.

Le plasticien plonge tous les éléments dans une matière/poussière poudreuse qui les prive de leur fonction. Ces camaïeux de gris leur confèrent de la poésie et les patinent d’un temps fictif. Par ce processus l’objet revêt un aspect iconique, évocateur d'un temps révolu, devenant en quelque sorte un fossile de fossile.

L’artiste nous rappelle que dans le flux perpétuel rien n’est figé et surtout pas la forme. Il travaille l’impermanence des choses. Héraclite d’Ephèse le disait déjà « rien n’est permanent sauf le changement ».

Isabelle de Maison Rouge

Mars 2021

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